Déclaration de l’avocat spécialisé en droits humains Siranush Sahakyan concernant l’acte d’accusation contre Ruben Vardanyan

Déclaration de l’avocat spécialisé en droits humains Siranush Sahakyan concernant l’acte d’accusation contre Ruben Vardanyan

 

Erevan, le 23 mai 2025 — Je, Siranush Sahakyan, avocate spécialisé en droits humains et représentante de la famille de Ruben Vardanyan, ainsi que membre de son équipe juridique internationale, déclare qu’après avoir examiné une partie de l’acte d’accusation dans l’affaire de Ruben Vardanyan (plus de 200 pages), il est évident que les accusations portées contre lui sont motivées par des considérations politiques, dénuées de fondement juridique et constituent une violation flagrante du droit international et des principes d’un procès équitable.

Plusieurs points critiques ressortent de ce document :

Premièrement, en contradiction directe avec les principes juridiques fondamentaux, l’acte d’accusation considère de fait l’identité arménienne de Ruben Vardanyan comme un fondement de sa responsabilité pénale. La formulation des accusations suggère que l’origine ethnique constitue à elle seule la principale preuve de culpabilité. Cela sape le fondement même des systèmes judiciaires modernes : le principe nullum crimen sine lege (« pas de crime sans loi ») et l’exigence de responsabilité pénale individuelle.

Deuxièmement, l’acte d’accusation qualifie la République du Haut-Karabakh (RHK), où vivent environ 150 000 Arméniens, d’organisation criminelle. Cela contredit l’un des principes fondamentaux du droit international : le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Dans l’acte d’accusation, ce droit est qualifié à tort d’incitation à la haine. Le document criminalise ainsi rétroactivement une entité politique engagée depuis des décennies dans des négociations avec le Groupe de Minsk de l’OSCE. De plus, Ruben Vardanyan est tenu responsable d’événements survenus jusqu’à 30 ans avant son arrivée dans cette république non reconnue.

Troisièmement, l’acte d’accusation accuse Ruben Vardanyan d’avoir franchi illégalement la frontière de l’État azerbaïdjanais, ce qui a servi de prétexte à son arrestation le 27 septembre 2023. Or, à l’époque, le corridor de Latchine était sous le contrôle des forces de maintien de la paix russes. De plus, l’Azerbaïdjan s’était engagé à garantir la liberté de circulation dans le corridor, conformément aux termes de l’accord trilatéral du 9 novembre 2020. La Cour internationale de justice des Nations Unies a également confirmé ce droit : les 22 février et 6 juillet 2023, elle a rendu des ordonnances contraignantes affirmant la nécessité d’assurer la libre circulation des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Latchine, dans les deux sens. Des décisions similaires ont été rendues par la Cour européenne des droits de l’homme.

La détention de Ruben Vardanyan était donc dénuée de fondement juridique. La RHK a toujours été considérée par la communauté internationale comme un territoire contesté, et pourtant l’acte d’accusation traite l’objet même de ce différend international — le statut juridique du territoire et le régime frontalier applicable — comme un fait établi. Ce faisant, l’accusation commet l’erreur logique de la pétition de principe, utilisant comme preuve une affirmation qui elle-même requiert une détermination juridique.

Enfin, l’acte d’accusation présente l’Initiative Humanitaire Aurora — cofondée par Ruben Vardanyan et ses partenaires pour venir en aide aux populations vulnérables du monde entier — comme une organisation qui financerait le terrorisme. Cette accusation est manifestement absurde, sachant qu’Aurora est reconnue internationalement comme une initiative humanitaire respectée qui vient en aide aux victimes de crises à travers le monde. Selon cette logique, l’aide humanitaire aux réfugiés et aux populations touchées par les conflits est assimilée à une activité criminelle.

En résumé, l’acte d’accusation n’est pas seulement motivé par des considérations politiques ; il constitue une déformation profonde des principes juridiques fondamentaux et crée un précédent dangereux.

Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Sept Arméniens actuellement détenus à Bakou ont déjà été condamnés à de lourdes peines de prison pour des motifs politiques et juridiquement infondés — un affront flagrant aux normes internationalement reconnues de justice et de procédure régulière. Les seize autres risquent désormais d’être poursuivis de manière tout aussi injuste et politiquement motivée.

Vous pouvez lire l’extrait de l’acte d’accusation — qui illustre clairement l’absurdité, la motivation politique et l’invalidité juridique des charges — en suivant le lien suivant.